de Jean-Michel Frodon ( directeur de la rédaction des Cahiers du Cinéma )
Le vélo, s’il a mérité de traverser l’écran, d’escalader ou de dévaler ses diagonales, c’est par et pour les femmes. Le vélo, pas la bicyclette ! : «la bicyclette, les amateurs de vélo sont formels sur ce point, injustes s’il le faut, odieux jusqu’au racisme, la bicyclette n’est pas un vélo. (...) Qu’on ne s’y trompe pas : mon ostracisme envers cet engin sans élégance sera aussi écoeurant que sa silhouette à cornes bovines. Il est «métro-boulot-dodo». Le vélo, messieurs, c’est Garbo-Bardot-Moreau.» Dixit René Fallet, qui en connaissait un rayon. La référence finale nous enchante, mieux, elle nous arrange : le vélo au cinéma, ne nous le dissimulons pas plus longtemps, est là pour faire saillir les poitrines, mettre en valeur les cuisses accortes et les postérieurs rebondis, faire voler les chevelures dans les rayons de soleil, accentuer de la grâce d’une courbe descendue en roue libre celle d’un galbe de mollet et de hanche, il ne gagne son droit de présence que pour faire perler, dans l’effort d’une montée, une sueur suggérant d’autres troubles. Le vélo alors est non seulement sensuel, il est vital.