D'un sommet l'autre

Trois femmes alpinistes l'Italienne Nives Meroi, la Basque Edurne Pasabán et l'Autrichienne Gerlinde Kaltenbrunner, ont entrepris l'ascension des 14 sommets les plus hauts du monde sans oxygène. Elles ont actuellement réussi à gravir 11 "8000".
Dans le très beau livre d'Erri De Luca "Sur les traces de Nives", Nives Meroi nous livre son esprit de la course : "Je ne suis pas en compétition avec les autres femmes alpinistes. Si c'était le cas, mes règles ne seraient pas acceptées. Nous montons sans oxygène et sans porteurs de haute altitude. Ce n'est pas par économie, parce que nous sommes à court d'argent, mais parce que c'est notre façon de vivre là-haut, sans retirer un gramme de poids de nos épaules. Nous essayons de passer le plus proprement possible sur la montagne, de rapporter dans la vallée jusqu'à la dernière boîte. Nous ne laissons pas de déchets. Certaines expéditions disent se passer d'oxygène, mais elles l'apportent avec elles comme équipement de secours. Nous non, il ne fait pas partie de nos bagages.
Il s'agit de règle bien à nous, nous ne les généralisons pas et ne faisons pas de compétitions. D'autres femmes alpinistes ont d'autres systèmes pour leur collection de sommets. Si un jour je fais l'ascension de tous les huit mille, je veux me mettre autour du cou un collier de quatorze perles fines, pêchées une à la fois avec mes seules forces et mon seul oxygène en ouvrant l'huitre sans outil d'effraction."

Photo de l'Autrichienne Gerlinde Kaltenbrunner :

( voyelle e )
"Peu de femmes font de l'alpinisme. Notre indifférence aux hiérarchies n'a pas encore produit un style différent, une manière plus domestique de vivre dans le campement. J'ai proposé à d'autres femmes alpinistes de tenter ensemble l'entreprise, mais ça n'a pas marché. L'alpinisme d'altitude est encore masculin. Quand l'une d'entre nous parviendra à refaire le circuit des huit mille, nous aurons retiré au genre masculin son dernier club privé. A partir de ce moment-là, l'alpinisme sera différent comme il l'a été le jour où le premier sherpa fit l'ascension de l'Everest avec Hillary.
Je ne dis pas que je suis en train d'escalader les huit mille au nom des femmes. J'escalade pour moi, pour ma faim des montagnes. Je ne suis qu'une alpiniste, mais avec l'article au féminin, une femme qui plante ses pointes de métal sur les parois les plus hautes de la planète. Une alpiniste, au féminin : une s'écrit avec un e, boucle à laquelle j'accroche mon petit drapeau de femme que je fais flotter là-haut." Nives Meroi.