Ce message avait été posté le samedi 11 mai 2002 sur Velo-club. Peu de choses ont changé.
Même si les médias s’en désintéressent profondément en France, il existe bel et bien des cyclistes professionnelles.
Peu de personnes seraient en effet capables de donner le nom de l’athlète qui a remportée la Grande Boucle Féminine Internationale (GBFI) ou bien l'Amstel Gold Race , ni même le nom de cinq « stars » du cyclisme mondial dames.
C’est pourquoi il me semble ici nécessaire de rappeler quelques caractéristiques qui font du cyclisme féminin un sport aussi noble que son homologue masculin.
Le cyclisme féminin présente bien des similitudes avec le cyclisme masculin. Tout d’abord, rappelons qu’il existe une Coupe du Monde Féminine. Les femmes ne courent pas Paris Roubaix mais disputent des épreuves de Coupe du Monde en Nouvelle Zélande, Australie, ainsi qu’aux Etats Unis et bien sûr les super classiques comme le Tour des Flandres ou la semi classique la Flèche Wallonne. De plus, elles disputent le Giro et la GBFI, ainsi que de nombreuses courses « hommes », comme la Sea Otter Classic aux Etats Unis.
Cela ne vous étonnera donc pas, c’est aussi l’UCI qui réglemente le cyclisme féminin. Elle a donc également établi un Top 100 UCI.
Ainsi, il semble donc que le cyclisme féminin présente les mêmes caractéristiques que le cyclisme masculin : les mêmes épreuves, le même classement, des championnes qui surclassent leurs adversaires, un cyclisme français relativement faible, et un désintérêt croissant des médias.
Quelles en sont les raisons ?A première vue, le manque de spectacle semble être la cause principale du déficit de considération du cyclisme féminin. En effet, ces dames courent bien moins vite que les hommes, les sprints semblent moins violents et les échappées moins décisives. Et bien c’est faux !
Les chutes frissonnantes qui émeuvent tant le public, comme celle d’Armentières sur le Tour 1992, existent malheureusement lors des sprints « féminins ». Ce fut par exemple le cas en 2001 lors de la première manche de la Coupe du Monde en Australie.
Toutefois, et fort heureusement, le public cherche autre chose dans le cyclisme, notamment les duels de titans. L’arrivée du Tourmalet lors de la GBFI en 2001 s’inscrit dans ces combats. En effet, Fabiana Luperini et Joane Somarriba s’étaient affrontées sans pitié, comme l’avaient fait Marco Pantani et Lance Armstrong sur le Mont Ventoux. Le scénario fut le même : les outsiders ont gagné dans les deux cas : Luperini – la Pantanina – et le Pirate se sont contentées de l’étape, tandis que Somarriba et Armstrong assommaient leur Tour. Mais à l’arrivée, l’Américain empochait 380 000 euros et l’Espagnole 3800 euros.
De tels déséquilibres ont existé dans la plupart des sports mais tendent à se résorber, comme dans le tennis par exemple. Pour y parvenir, les tennis women ont pris du muscle et raccourci leurs jupes. De même, le beach volley féminin a gagné des parts d’audimat avec des athlètes évoluant en maillots de bain. Nos cyclistes dames ont bien raccourci leurs cuissards pour pouvoir mettre des jupes (trace du bronzage), mais on les imagine mal en tenue ultra moulante qui pourtant relancerait - malheureusement vu le principe - l’intérêt porté à leur sport.
Hormis ces considérations vestimentaires, le cyclisme féminin souffre plus profondément d’un mal de reconnaissance profondément injuste. Cependant, ce sentiment d’ « abandon » est bien plus présent en France que dans les autres pays européens. En effet, l’Italie ou même le Canada ont su attirer les sponsors avec, de manière hebdomadaire, des courses d’une journée qui drainent de nombreux spectateurs. Le Tour Midi Pyrénées se court par exemple dans des villes de faible importance, inaptes a donner du retentissement à l’épreuve comme une étape Millau – Cordes sur Ciel, en 2002, qui visitait de superbes décors, mais qui négligeait les alentours de Rodez qui auraient pu fournir un public familial motivé pour voir passer Joane Somarriba. De même, la Grande Boucle Féminine Internationale semble avoir le chic, (certainement l’obligation) pour organiser des contre la montre en pleine campagne, afin d’éviter soigneusement les agglomérations
Finalement, je vois mal ce qui pourrait relancer, voire même faire naître une passion pour le cyclisme féminin. Pour en revenir en France, quand bien même une nouvelle Française gagnerait le Tour, il n’est pas évident que France Télévision accorderait plus de temps d’antenne au cyclisme féminin. Rappelons pour conclure que la Championne du Monde de cyclo cross 2002 est Française : il s’agit de Laurence Leboucher. Et bien c’est à peine si l’on a pu voir les images de son arrivée et France Info n’avait brièvement annoncé la nouvelle qu’à la fin de son flash-info …
Par Geoffroy Lacan